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14 avril 2012 6 14 /04 /avril /2012 00:00

at ecriture 011


A peine ai-je le dos tourné que je l’entends. L’Arbre. Le vent qui annonce la tempête a beau mugir, rugir, moi, je l’entends bien. Il a une belle voix de basse. Grave et profonde, elle me donne envie de faire demi tour et de coller mon oreille contre son écorce. Ma tête contre l’Arbre, l’oreille aux aguets, je guette et espère cette voix qui résonne et vibre jusqu’à moi.

            Il me raconte son histoire. Il était né ici, au milieu des herbes, dans un champ où paissaient les vaches, d’une graine laissée par un oiseau. Il avait poussé là, avec toute l’ardeur de sa jeunesse, d’une sève bouillonnante et vive. Dès qu’il atteignit une taille honorable, des hommes étaient venus, lui avaient brisé les membres. Il avait pansé ses blessures année après année.

Souffrance de la sève qui s’échappe et coule telle des larmes.

Souffrance de solitude aussi.

 

            Un beau jour de printemps, le père François était venu. Ca en avait fait du remue-ménage ! A grands coups de barre à mine, il avait creusé la terre, tout autour de lui et planté de jeunes pousses en droites bien alignées. Dans le vent, au fil des saisons, le bruissement des feuilles avait fait jaillir mille voix juvéniles et volubiles. Les peupliers, dans leur folle jeunesse, se montraient de fieffés bavards ! Ils avaient peu à peu grandi, l’avaient rejoint en taille, puis l’avaient allègrement dépassé.

            Aujourd’hui, leurs têtes rejoignaient le ciel, quand lui, mutilé encore et encore, s’épaississait. Leurs voix étaient devenues plus douces, plus lointaines aussi. Du haut de leurs cimes, ils lui racontaient les paysages lointains, les paysages qu’il ne verrait jamais.

Alors il rêvait.

Alors, il était heureux.

Véronique

 


 


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